L’Europe et l’évasion fiscale des multinationales

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L’Europe ne devrait plus tolérer l’existence d’entités opaques ou anonymes, par lesquelles transitent des flux financiers considérables sans rapport avec des échanges économiques réels. Trusts, fiducies, sociétes- crans, ces entités n’ont d’autre but que d’empêcher l’identification de leurs ayants droit.

Et la réalité institutionnelle est toute autre. Jean- Claude Juncker a été coopté président de la Commission Européenne en juillet 2014, après avoir été premier ministre entre 1995 et 2013 du paradis fiscal qu’est devenu le Luxembourg.

Le cadre juridique 

Il aura fallu attendre l’année 2013 pour que le projet mené par l’OCDE et les pays membres du G20 à l’encontre des pratiques des multinationales visant à utiliser les paradis fiscaux pour échapper à l’impôt, soit relayé par la Commission européenne.
En 2014, l’enquète Luxleaks nous apprenait que les Grandes Entreprises Internationales ne payaient pratiquement pas d’impôts en Europe, au travers d’accords passés avec le Luxembourg.
En 2016, les révélations sur les Panama Papers ont dévoilé les activités dissimulées de personnes aisées dans le monde entier au travers de sociétés offshores domiciliées dans 21 paradis fiscaux.
D’où la nécessité d’aller vers plus de transparence fiscale entre les Etats membres de l’UE.
C’est ainsi qu’en Avril 2016, la Commission a proposé une directive visant à une obligation de transparence s’appliquant à l’ensemble des multinationales dans tous les pays où elles exercent des activités.
En Octobre 2016, la Commission a élaboré une nouvelle proposition autour de la mise en place d’une assiette commune consolidée pour l’impôt sur les sociétés ( ACCIS), le projet étant coordonné par Pierre Moscovici, commissaire européen aux affaires économiques et à la fiscalité qui permettrait de faire un grand pas en avant, si l’on parvenait à éviter la création de nouveaux mécanismes dont les entreprises se servent pour échapper au fisc, sous la forme de déductions fiscales massives.

D’après les estimations du service de recherche du Parlement européen en 2016, l ‘évasion fiscale des grandes entreprise en Europe représente chaque année aux États membres un manque à gagner entre 50 et 70 Milliards d’euros de recettes.
Soulignons aussi que, face à la concurrence fiscale déloyale et débridée que se livrent les États, les GAFA ( Google, Apple, Facebook et Amazon ) géants de l’économie numérique, échappent presque entièrement au fisc, de par leur talent à tirer parti des disparités légales dans l’Union.
Cinq millions d’euros est la modeste somme que Google a versé en 2015 au Trésor public français au titre de l’impôt sur ses bénéfices.

Quelques pratiques des multinationales dans l’espace européen

L’Irlande avait accordé à Apple des aides d’ État considérées illégales, lui permettant de ne payer que 0,005% d’impôts dans ce pays. La Commission a demandé à la firme à la pomme en 2016 de rembourser 13 milliard d’Euros à l’Irlande, décision aussitôt contestée au cours du mois de décembre sous prétexte de la violation de la souveraineté du pays.
Le Luxembourg aurait aussi conclu des accords secrets avec Engie, Fiat et Amazon ;
La dernière enquête effectuée par la Commission concerne le géant de l’énergie ENGIE dont l’État français est le principal actionnaire en détenant 32,76% du capital.
Le montage dénoncé concerne des transactions entre plusieurs sociétés de droit luxembourgeois du Groupe, lui permettant d’éviter de payer 300 millions d’Euros d’impôts au Luxembourg , lorsqu’il était encore GDF SUEZ.
Mc Donald’s va transférer sa holding d’optimisation fiscale du Luxembourg vers le Royaume Uni au cours de ce mois de Janvier. Actuellement fixé à 20%, le taux d’IS au RU va être fixé à 17% d’ici l’année 2020, ce qui en fera le taux le plus faible de l’ensemble des pays du G20 .
Selon un récent rapport, le Groupe Inditex qui recouvre l’enseigne Zara aurait évité de payer 585 millions d’Euros en élaborant des montages fiscaux entre les Pays-Bas, l’Irlande, la Suisse et le Luxembourg.

Comment se diriger vers plus de transparence pour rétablir l’égalité devant l’impôt

L’UE a adopté en Janvier 2016 le “paquet “sur la lutte contre l’évasion fiscale permettant de mettre en place une convergence des systèmes fiscaux des 28 pays :
Un « reporting public pays par pays »obligeant les multinationales réalisant un chiffre d’affaires supérieur à 750 millions d’Euros de publier les données relatives aux impôts dans les pays où elles exercent leurs activités tout en renforçant les pouvoirs de contrôle des administrations fiscales sur les opérations internes aux groupes. Ces dispositions s’appliquent déjà depuis le mois de Juillet 2014 aux banques internationales, mais ont été censurées en france par le Conseil Constitutionnel au cours du mois de décembre dernier.
Une assiette commune consolidée de l’impôt sur les sociétés ( ACCIS).
Une harmonisation des règles du droit pénal de l’évasion fiscale.
Une liste noire des paradis fiscaux à partir d’indicateurs plus stricts que ceux retenus par l’OCDE, en y intégrant les territoires européens ,et prendre des mesures de rétorsion à leur encontre.

Car, rappelons le, chaque année la fraude et l’évasion fiscale, coûtent, d’après un rapport parlementaire publié en 2015 environ 1000 milliards d’Euros, dont 60 à 80 Milliards pour la France.
Face à ce projet ambitieux, l’actuel président de la Communauté, Jean-Claude Juncker est-il le mieux placé pour mener le chantier de la nécessaire convergence fiscale ?
D’autant plus qu’il existe depuis l’année 1998 un groupe «  Code de conduite fiscalité des entreprises », chargé de mettre un terme à la concurrence fiscale dommageable entre les pays de l’UE ( Source Conseil européen ), à caractère consultatif.

On se heurte ici à la complexité du fonctionnement des institutions de l’UE qui fait poser de sérieux doutes sur l’aboutissement de telles mesures. Le Parlement européen, dès le mois de septembre 2011 avait demandé à la Commission de “ faire de la lutte contre les sociétés-écrans anonymes dans les juridictions opaques une priorité de la prochaine réforme de la directive sur le blanchiment des capitaux.”

Est-il raisonnable de donner le même poids dans l’union à des pays dont le business model est d’être des paradis fiscaux ( Luxembourg, Chypre, Irlande) face à la France, l’Allemagne , l’Italie et l’Espagne qui regroupent 77% du PIB de la zone, pour mener à terme ce type de projet essentiel ? On observe que les blocages institutionnels sont liés à un processus de décision incompatible avec la gestion d’un ensemble de 28 pays très disparates, regroupant 510,1 Millions d’habitants. D’autre part les règles de l’union demandent l’unanimité des 28 États membres avant qu’une décision finale ne soit adoptée en matière de fiscalité.

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