Les valorisations des entreprises technologiques atteignent des niveaux que nous n’avions pas vus depuis les années 2000.
Comment ces excès peuvent ils se répéter de manière si similaire ? Tout simplement car l’éclatement de la bulle Internet est loin. Les grands brûlés des .com ont été remplacés par une nouvelle génération d’investisseurs : tout ce qu’il faut pour préparer une nouvelle bulle !
Les courbes de progression exponentielles font envie, et vous pouvez être tenté de spéculer sur ces valeurs. Je vous l’accorde : il y a des fortunes à se faire avec de tels parcours.
Mais gardez à l’esprit qu’il s’agit d’un jeu de chaises musicales qui ne dure que tant que l’orchestre joue. Lorsque la musique s’arrête, assurez-vous d’être le premier à gagner les issues de secours. Sachant que les « grosses mains » vous auront probablement précédé, votre position gagnante durant des mois peut vite basculer dans le rouge !
Je vous propose aujourd’hui une stratégie d’investissement dans les sociétés technologiques avec comme objectif premier l’appréciation de votre capital sur le long terme.
Rechercher le rendement au long cours plus que la plus-value instantanée
La philosophie d’un investissement basé sur la valeur est d’acheter une action lorsque vous pensez qu’elle vous rapportera de l’argent sur le long terme. Elle diffère en ce sens d’un investissement spéculatif où vous achetez un titre dans l’optique de le revendre plus cher quelle que soit l’échéance.
La valeur juste d’une action est, pour simplifier, le prix auquel vous pourrez la revendre auquel vous ajoutez les dividendes perçus et retranchez la rémunération de l’épargne sans risque sur toute la durée de détention.
A l’heure des taux zéro, la rémunération de l’épargne sans risque est négligeable. Reste donc à estimer la valeur de revente de l’action et des dividendes à percevoir.
Votre travail d’investisseur est d’aller à la pêche aux informations pour estimer le mieux possible cette valeur intrinsèque.
Le marché, lui, se contentera de vous fournir le prix de l’action à un instant donné. Si ce prix est très inférieur à la valeur que vous avez calculée, vous pouvez acheter en toute confiance. Si ce prix est supérieur, il est temps de vendre.
Pour éviter les aller-retours incessants, vous déterminerez une plage de neutralité dans laquelle vous conserverez vos titres sans les acheter, ni les vendre.
Une approche basée sur la valeur vous permet par conséquent d’avoir un portefeuille relativement stable que vous pouvez faire grossir au rythme de votre capacité d’épargne.
Vous n’utilisez les variations du marché qu’à votre avantage : pour vous renforcer lorsque les prix baissent, ou pour vous alléger lorsque les prix ont monté.
Comment estimer la valeur intrinsèque en deux étapes
Pour les sociétés dites traditionnelles, l’approche par la valeur se fait par le calcul de ratios (cours/bénéfices, valorisation/chiffre d’affaires, taux d’endettement, etc.). Cette grille de lecture permet de déterminer les actions peu chères dans un secteur donné en comparant les ratios des concurrents entre eux.
Le problème avec les valeurs de l’économie numérique est que les sociétés ont pris l’habitude dans les années 2000 de s’introduire en Bourse alors qu’elles n’ont aucun plan réaliste pour dégager un jour des bénéfices.
Les indices viennent d’atteindre un niveau jamais observé depuis les bulles de 1929, 2000 et 2007.
Si l’on peut tolérer d’investir dans une société qui n’est pas encore dans le vert lors de son introduction en Bourse, il faut toutefois redoubler de prudence.
Étape 1 : Calculer le bénéfice possible
Un investissement doit être rentable à plus ou moins court terme. Si l’on vous propose d’investir dans une société qui ne dégage pas de bénéfices, posez-vous la question : l’entreprise pourra-t-elle créer de la valeur à terme ?
Pour y répondre, il faut :
- a) que l’entreprise crée de la valeur pour des clients solvables
- b) que son coût de fonctionnement soit inférieur à la valeur créée
Cela vous semble évident ? Parfait ! En appliquant ces deux critères, vous éliminez déjà 50% des valeurs High-Tech.
L’application Snapchat est l’exemple parfait. Très peu d’applications mobiles offrent suffisamment de valeur pour que les clients acceptent de les payer plus que quelques centimes.
A défaut de mieux, les dirigeants annoncent que la publicité paiera. Ce jokerdans les business plan est quasi-systématiquement de la poudre aux yeux. La réalité montre que les revenus publicitaires sur Internet sont captés par quelques géants. Facebook est la seule plate-forme à avoir su générer des bénéficies significatifs grâce à la publicité depuis les années 2000 !
Le critère a) vous permet donc de considérer avec beaucoup de circonspection l’IPO de Snapchat.
La direction ayant prévu de laisser filer les déficits en embauchant massivement après l’IPO, le critère b) est un autre signal inquiétant quant à cette IPO.
Etape 2 : Se positionner au bon prix
La première étape vous a permis de filtrer les entreprises qui ne créent pas de valeur. Reste la question du prix.
A ce stade, il vous faut quantifier la valeur que vous pensez que la société pourra créer, et estimer sa durée de vie.
Pour un positionnement de référence sur un marché mature, comme Google dans son activité de moteur de recherche, vous pouvez tabler sur une stabilité des parts de marché et du bénéfice. Les éventuels bénéfices supplémentaires viendront de l’augmentation du nombre de personnes connectées à Internet.
Dans le cas d’Apple, le marché des smartphones ayant atteint sa maturité, la croissance des ventes d’iPhone a peu de chances de continuer au même rythme qu’au cours de ces 10 dernières années. En tablant sur un taux de renouvellement tous les deux ans, une analyse au doigt mouillé donne une estimation de bénéfices divisée par deux d’ici 10 ans.
Ce sont ces hypothèses que font actuellement les marchés, avec une valorisation d’environ 30 fois les bénéfices pour Alphabet et 15 fois les bénéfices actuels pour Apple.
Dans ce cas, les actions semblent au bon prix. Elles sont dans une zone neutre qui ne justifie ni achat, ni vente. C’est pour cette raison que je n’ai pas de conseils particuliers à donner sur ces valeurs.
En revanche, la même grille de lecture appliquée à Amazon montre une société qui se paye très cher, d’autant plus qu’elle est déjà le leader sur son marché. Pour cette raison, je conseille de rester à l’écart de la valeur.
A titre indicatif, une valeur qui se paye 10 fois ses bénéfices est habituellement considérée comme peu chère. Vous pouvez appliquer ce même ratio pour les « bénéfices anticipés » que vous prêtez à vos sociétés technologiques préférées.
Si la valeur monte au-delà de 25 fois les bénéfices, le titre est en zone de surchauffe. Il est alors temps de s’en séparer, quitte à le remettre en portefeuille après une éventuelle baisse du cours.
Évitez les -90% sur certaines valeurs
Vous disposez des outils nécessaires pour éliminer les canards boiteux de la cote dont la valeur se volatilise lorsque l’euphorie généralisée cesse.
Votre portefeuille sera d’autant plus robuste en cas de retournement brutal des marchés.
Etienne Henri
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Source: la-chronique-agora