Pourquoi Trump n’a pu mettre un terme aux « guerres sans fin » de Washington

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President Donald Trump shakes hands with Chairman of the Joint Chiefs of Staff Gen. Mark Milley during a briefing with senior military leaders in the Cabinet Room at the White House in Washington, Monday, Oct. 7, 2019. (AP Photo/Carolyn Kaster)

Récemment, Donald Trump a surpris ses généraux en annonçant sur Twitter qu’il souhaitait rapatrier les troupes américaines déployées en Somalie, en Afghanistan et en Syrie. Or, son chef d’état-major interarmées a refusé de confirmer ces plans, et un certain nombre de généraux et d’experts des questions de Défense critiquent ce qu’ils perçoivent comme des décisions purement électoralistes. Dans tous les cas, nous verrons que ces retraits contestés, s’ils se réalisent, ne mettront pas un terme à ces conflits, ni à l’engagement des États-Unis dans ces régions. En effet, entre les réticences du leadership militaire à quitter ces théâtres, et la conflictualité persistante qui s’est imposée dans ces pays, il sera impossible de mettre un terme aux « guerres sans fin » de Washington dans un futur proche. Décryptage.

Le 17 octobre dernier, nos confrères de l’Associated Press ont rapporté que « le conseiller à la Sécurité nationale du Président Trump [avait confirmé] son assertion voulant que le nombre de soldats américains en Afghanistan passerait à 2 500 au début de l’année prochaine, tout en suggérant que le tweet de Trump selon lequel toutes les forces devraient rentrer chez elles à Noël était plus un souhait qu’une réalité. » Ils ajoutèrent qu’il cherchait « à clarifier une série de déclarations déroutantes [de Trump] sur la présence américaine en Afghanistan, (…) dans une apparente pique adressée au général Mark Milley, le président du Comité des chefs d’état-major interarmées. Milley a déclaré ces derniers jours que les États-Unis exécutaient un plan pour réduire le nombre de soldats à 4 500 en novembre, mais parler de toute réduction supplémentaire relèverait selon lui de la “spéculation” ».

En réalité, le général Milley n’est pas le seul à critiquer ce plan au Pentagone, et l’Afghanistan n’est pas l’unique pays concerné par ces déclarations de Donald Trump. En effet, comme l’a rapporté le New York Times le 15 octobre, le Président américain « a déclaré à des conseillers de haut rang qu’il souhaitait également adopter des plans de retrait de toutes les forces américaines en Somalie, malgré les avertissements de hauts responsables de l’armée et de la lutte antiterroriste estimant qu’une telle initiative renforcerait la filiale meurtrière d’al-Qaïda dans ce pays, et céderait à la Chine et à la Russie un terrain stratégique en Afrique de l’Est. » Toujours selon le Times, « le Président a envoyé des signaux contradictoires le mois dernier en déclarant que les forces américaines “sont hors de Syrie”, sauf pour garder les champs pétrolifères de la région. Ses commentaires sont intervenus le jour où le Pentagone annonça qu’il envoyait des véhicules de combat Bradley, davantage d’avions de combat et une centaine de soldats supplémentaires dans le Nord-Est de la Syrie après qu’un véhicule blindé russe y ait percuté une patrouille terrestre américaine en août, blessant sept soldats. »

En clair, Trump montre une volonté explicite de respecter l’une de ses promesses de campagne, soit le fait de mettre un terme aux « guerres sans fin » des États-Unis. Ce n’est pas la première fois qu’il réaffirme cette ambition, mais qu’il se heurte aux réticences du Pentagone et du Congrès. En décembre 2018, son secrétaire à la Défense James Mattis démissionna du fait qu’il s’opposait à la volonté de Trump de retirer les troupes du Pentagone déployées en Syrie. Comme on a pu l’observer par la suite, cette décision ne fut pas immédiatement mise en œuvre, et le projet de retirer les soldats américains du Nord de la Syrie à l’automne 2019 s’est traduit par un redéploiement dans l’Est de ce pays. Il sera donc difficile, pour ne pas dire impossible, que Trump rapatrie l’intégralité des troupes américaines opérant au Levant, d’autant plus qu’il veut y maintenir celles qui « gardent le pétrole ». Cette volonté s’est traduite par un accord récent entre l’administration autonome kurde dans le Nord-Est syrien et une compagnie pétrolière américaine, alors qu’environ 600 soldats du Pentagone restent déployés dans cette zone pour y assurer cette mission et la lutte contre Daech.

Parallèlement, un éventuel retrait des soldats américains opérant en Somalie serait symbolique, puisque les États-Unis devraient y poursuivre des opérations militaires contre la branche locale d’al-Qaïda. Comme l’a souligné le Times, « une idée actuellement à l’étude consisterait à retirer la plupart ou la totalité des troupes terrestres du pays – y compris celles qui ont formé et conseillé les forces somaliennes –, et à mettre fin aux frappes visant à combattre ou à dégrader les Shebab, la filiale la plus vaste et active d’al-Qaïda. Les frappes antiterroristes, l’utilisation de drones, la présence de troupes dans les pays voisins et le ciblage individuel de membres des Shebab soupçonnés de planifier des attaques terroristes en dehors de la Somalie seraient toujours autorisés. »

En Afghanistan, outre le fait qu’un retrait total des troupes américaines avant Noël semble irréalisable, Washington continuera d’opérer dans ce pays par le biais du Pakistan. En effet, comme l’a observé le spécialiste Karim Pakzad, « non seulement Donald Trump remet les clés de l’Afghanistan aux talibans, mais il garde un double ! Les États-Unis seront présents en Afghanistan par le biais de leur allié pakistanais, sans avoir besoin d’une présence militaire sur le terrain. Et il est probable que l’Afghanistan, où 90 % de la population vit sous le seuil de pauvreté, bénéficiera d’une aide financière américaine. »

Rappelons alors que la volonté de Trump de retirer ses soldats d’Afghanistan est due au fait qu’il souhaite transférer les 50 milliards de dollars de dépenses militaires annuelles dédiées à ce pays vers son effort prioritaire de contrer la Chine. Ironiquement, un retrait précipité des États-Unis encouragerait une implantation chinoise en Afghanistan, qui est déjà envisagée dans les secteurs miniers et pétroliers. Soulignons d’ailleurs que ce pays est l’un des 138 signataires du protocole d’accord de l’Initiative Route et Ceinture, et que Pékin n’ignore pas les potentiels 1 000 milliards de dollars de réserves de minerais estimés par le Pentagone en 2010, qui perçoit l’Afghanistan comme une potentielle « Arabie saoudite du lithium ». Vu l’audacieuse guerre des semi-conducteurs lancée par l’administration Trump contre Pékin en mai dernier, l’éventualité que la Chine finisse par bénéficier d’un retrait américain d’Afghanistan en accédant à ses vastes réserves de terres rares serait pour le moins ironique – d’autant plus que l’Empire du Milieu est en train de doper ses capacités de production dans ce domaine en réponse à l’embargo de Washington.

 

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Au sujet du fondateur de www.deep-news.media : Diplômé d’un Master 2 « Théorie et pratique des droits de l’Homme » à la Faculté de Droit de Grenoble, Maxime Chaix est journaliste, essayiste et traducteur, spécialisé dans les domaines du renseignement, des opérations clandestines, des questions stratégiques, de la criminalité financière et du terrorisme global. En mars 2019, il a publié son premier livre, « La guerre de l'ombre en Syrie », qui a été recommandé par un certain nombre d'experts et de journalistes, notamment dans Marianne, Le Monde diplomatique, RAIDS et la Revue Défense Nationale (https://maximechaix.info/?p=3829). En janvier 2020, il a lancé un nouveau site d'informations, d'enquêtes et d'analyses baptisé www.deep-news.media, qui s'est fixé comme objectif de traiter en profondeur des questions géopolitiques les plus sensibles et taboues en Occident. Depuis 2014, il a notamment écrit pour Paris Match, MiddleEastEye.net, RAIDS Magazine, GlobalGeoNews.com, dedefensa.org et le Club de Mediapart. Déplorant le soutien irréfléchi de la majorité des médias français pour le militarisme occidental – ce qu’il considère comme préjudiciable au débat démocratique et à la sécurité collective –, il défend un journalisme à l’anglo-saxonne, résolument critique envers les guerres de changement de régime, les opérations clandestines et la surveillance de masse imposées par les puissances de l'OTAN. Il s’inspire donc de Glenn Greenwald, Trevor Timm, John Pilger, Nafeez Ahmed, Gareth Porter, Mehdi Hasan, Jeremy Scahill ou encore Peter Dale Scott, un auteur et ancien diplomate canadien dont il est le principal traducteur francophone.

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