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Pourquoi ne parle-t-on pas de projet ? Pourquoi dit-on que cette campagne est nauséabonde ? La question centrale de la campagne présidentielle est-elle vraiment une question de personne ou même de projet économique ? Ne serait-ce pas au contraire d’une alternative plus fondamentale qu’il s’agit ?

Les esprits s’échauffent, les invectives volent ; nous vivons une campagne présidentielle au mieux « pittoresque » ou « rocambolesque » (comme l’a défini Alain Duhamel chez ZENPP), au pire « de caniveau », nauséabonde. Derrière le brouhaha, par-delà les éditoriaux catastrophés, survolant les postures des uns vis-à-vis des situations des autres et les combines d’investitures, la vérité de la campagne, l’aune à laquelle le vote populaire se mesurera, est ailleurs.

En réalité, il ne s’agit pas d’une campagne pire que les autres, mais d’une campagne tragique. Une campagne qui s’inscrit dans la tragédie de l’histoire des peuples, des guerres et des révolutions. Il est loin le temps ou les candidats jouaient de l’accordéon à Chamalières ou chantaient « les feuilles mortes » chez Patrick Sébastien pour plaire aux jeunes et à la ménagère de moins de 50 ans.

Je n’irais pas jusqu’à dire que l’heure est grave, mais elle n’est pas légère. Le paysage politique se recompose. Ceux qui ne voient pas le tragique de la situation diront qu’il se décompose, aveuglé par un espoir puéril de « vivre ensemble » ou « d’identité heureuse ». Non, ce n’est pas du bonheur et de la couleur des anges dont il s’agit, mais du drame racinien de la politique, des idées pour lesquels on est prêts au sacrifice, des principes qui se dressent, des visions qui s’affrontent, au bord du gouffre.

le peuple français est en train d’imprimer à la politique un changement de polarité

Aux angéliques catastrophés, je suggère d’abandonner cet a priori du « tous pourris », ou simplement du « tous mesquins » – en négatif du « vivre ensemble » – et de laisser à notre personnel politique le bénéfice du doute : il est composé majoritairement d’hommes et de femmes qui, dans l’ensemble, défendent avant tout leurs idées, mais qui se trouvent sur des sables mouvants parce que le pays est en train de changer : le peuple français est en train d’imprimer à la politique un changement de polarité. Théorisé par de nombreux observateurs, réclamé par de nombreux petits partis embryonnaires, il sera finalement mis en musique par Emmanuel Macron et François Fillon.

Cette perte de repère jette nos représentants politiques dans le doute pour ne pas dire le désarroi. Les attaques que les candidats subissent, d’une part des pourfendeurs de la pensée unique et de la bien-pensance, et d’autre part d’un pouvoir moribond, relayé par une presse complaisante mais méprisante avec les élus (protégée qu’elle est de n’être pas vraiment dans la mêlée), ajoutent à ce bouleversement le sentiment pour chacun d’avoir une cible dans le dos. Elles en poussent beaucoup à obtempérer à la vindicte médiatique, à réagir plutôt qu’à réfléchir, et finalement à abandonner leur candidat au milieu du gué, ou à en rejoindre un autre qui aurait plus le vent en poupe.

Ni droite ni gauche

Alors qu’est-ce qu’il se passe ? Quel est le nouveau choix qui s’impose, quelle est cette croisée des chemins devant laquelle nous nous trouvons pour justifier cette débandade politique, ce changement de ligne, ce brouillage de piste. Qu’est-ce qui justifie qu’un Alain Madelin soutienne Macron alors qu’un Jean-Pierre Chevènement se prépare à soutenir Fillon. Il ne s’agit visiblement plus ni de droite ni de gauche, même si François Fillon se démène pour « rassembler son camp ». Il ne s’agit pas de salaire universel ou de « casse sociale », de 32 ou 39 heures, de 120 ou 500 mille fonctionnaires, de sécurité ou de sécuritarisme, de TVA ou de CSG …

Europe fédérale contre
Confédération d’états-nations

Par-delà les joutes peuplées d’invectives et de ressentiments, nous assistons à un vrai débat de fond, où des questions essentielles se posent à l’avenir d’un pays et d’un continent. Chacun appel à une confrontation « projet-contre-projet », que l’on sous-entend économiques, alors que ce n’est pas le fond du débat. Le vent de l’histoire souffle et le choix est clair. A défaut d’être simple et audible, à défaut d’être « acceptable », la question obsède chacun des principaux candidats qui se positionnent, qu’ils le veuillent ou non, d’un bord ou de l’autre :

D’un côté, la vision d’une Europe fédérale, au sein de laquelle la France doit jouer son rôle, plus en adéquation avec les défis du XXIème siècle ; dès lors, le redressement du pays passe par la construction européenne, le renforcement des marchés économiques et financiers dans lesquels s’inscrit cette Europe fédérale ouverte au monde, qui dépasse les appartenances nationales et revendications ethniques.

De l’autre, la primauté à la Nation dont la stabilité et la sécurité dépend de ses choix propres, et du cadre confédératif Européen dans lequel elle se trouve. Un pays qui doit sauver son modèle Républicain et son identité, bousculée par une immigration massive et un terrorisme aveugle, qui viennent tous deux des mêmes parties du monde.

L’un voit la solution en Europe et dans les mécanismes de régulation internationaux. Il représente cette partie de l’électorat qui fustige le repli sur soi, le choix des peuples peu instruits qui votent contre leurs propres intérêts (Bexit, Trump). Un électorat qui s’inquiétait encore hier de la possible victoire de l’extrémisme au Pays-Bas, et l’analysait comme une incompréhensible erreur que s’apprêtait à commettre un peuple, pourtant prospère, protégé de l’immigration et du terrorisme, qui n’a aucune raison de s’inquiéter de son identité.

L’autre voit la solution dans la Nation et dans la libération des énergies nationales. Il représente l’électorat qui s’inquiète d’une construction européenne qu’il accuse de se faire sans lui, qui voit dans l’établissement de zone de non-droit, au-delà de l’incurie d’une élite incapable de prendre avec courage les « mesures qui s’imposent », l’établissement de foyer terroristes à l’intérieur de ses frontières, dans sa ville, dans son quartier, et qui s’inquiète de la démission de l’état.

C’est donc un choix de priorité qui est le nôtre : Faut-il considérer que la chance de la France, c’est l’Europe, et que c’est par elle qu’elle se redressera, même si pour cela il faut se débarrasser des oripeaux surannés d’une soi-disant culture française, qui en réalité est multiple, et en pleine transformation, justement tournée vers le monde ; ou au contraire, faut-il considérer que la France doit se redresser en s’appuyant sur les fondamentaux d’un pays culturellement riche et pourvue d’une identité forte, mais en crise, pour enfin participer dans de bonnes conditions à une Europe maîtrisée, qui respecte avant tout les nations qui la composent ?

Chacun des deux bords pourrait revendiquer ces deux options et prétendre au compromis, à la synthèse, certes, mais où se situent les priorités ? Doit-on avancer vers un avenir, résultat de 60 ans de construction européenne, ou au contraire faut-il marquer le pas et reconstruire, refonder ? On se réclame de la modernité contre les valeurs culturelles, de la créativité contre le courage, mais toutes ces valeurs sont malgré tout au programme de chacun. Aux électeurs de lire dans le discours des uns et des autres où se trouve la ligne directrice, la vision, le chemin tracé:

Faut-il construire l’Europe sur les ruines de l’ancien monde, et courir au tout-libéral à la merci de la dérégulation financière, ou faut-il se replier sur soi, pour surtout ne pas lâcher la proie pour l’ombre, au risque de rater le train qui démarre ?

D’évidence, le compromis Delors de « Fédération d’états nations » n’est plus à l’ordre du jour, d’un côté comme de l’autre, depuis longtemps.

Le Pen : L’épée de Damoclès qui dramatise le premier tour

Mais, aujourd’hui, l’étrangeté, c’est que le vrai débat a lieu au premier tour, et que c’est là que l’élection présidentielle va se jouer. Les candidats en sont tétanisés. Nous sommes devant une élection à un tour avec une épée de Damoclès : Marine Le Pen, qui pourrait, si on en prend pas garde, gagner le deuxième, et siffler la fin de la récré.

Ne nous y trompons pas : rien, aujourd’hui, dans le discours de Marine Le Pen ne redonne espoir, ne propose une voie pour laquelle l’enthousiasme des peuples serait recherché. Il n’y a que l’instrumentalisation de la juste colère d’une population que les élites n’écoutent plus, qui se révolte contre la condescendance avec laquelle elle est traitée. L’espoir, la voie, le choix positif est dans les discours aussi bien d’Emmanuel Macron que de François Fillon, mais savent-ils que faire de cette colère ? Celle de ceux qui voient ce qu’on leur cache et qui entendent ce que l’on murmure dans les alcôves ? Le danger est bien là : se font-ils vraiment entendre ? Sont-ils audibles ? Répondent-ils aux vraies questions ?

La 5ème république,
plus pertinente que jamais ?

C’est maintenant que la 5eme République prend tout son sens : Le futur président de la république est sommé de partager sa vision, de dire sa France, quel que soit sa politique économique (on verra ça lors des législatives, qui sont faites pour cela), d’expliquer ses priorités, ses arbitrages, de montrer vers quels horizons il souhaite guider le Pays.

Le soulèvement populaire, que représente toute élection présidentielle de cette République, a d’ores et déjà défini les nouvelles frontières de la politique des 5 ou 10 prochaines années : Le mondialisme ou le nationalisme ? La priorité à l’Europe ou à la France ? L’Europe fédérale ou l’Europe « confédération » d’états-nations ? Sans réponse à ces questions, la colère des Français se fera entendre le 7 mai prochain, ou sinon, à coup sûr en 2022.

Le clivage Droite-Gauche est-il bien mort ? Certes non. Mais il a laissé la place, devant l’adversité et l’impératif démocratique, devant le retour tonitruant du peuple dans les combines politiciennes, à un choix révolutionnaire. Le peuple s’apprête (ou pas), à revenir sur sa parole, donnée le 20 septembre 1992, quand il a offert un blanc-seing à l’Union Européenne et abandonné sa souveraineté nationale.


Pour y voir clair, ceux qui souhaitent une « Confédération d’états nations » l’ont clairement exprimés, les autres sont soit pour la sortie pure et simple, soit proposent plus de « considérations sociales » dans les institutions actuelles, mais les laissent aller vers l’Europe fédérale, et ne proposent pas de bouleversement du calendrier.

Confédération d’états nations:
– François Fillon
– Nicolas Dupont-Aignan

Europe fédérale (Maastricht):
– Emmanuel Macron
– Benoît Hamon
– Jean Lassalle

FREXIT :
Tous les autres (avec un peu plus de flou pour Jean-Luc Mélenchon ou Marine Le Pen, mais le résultat est le même)

Au vu des sondages, on peut supposer qu’à la question « Fédération ou Confédération », la Confédération l’emporterait, et qu’à la question « Frexit », le Frexit ne l’emporterait pas.

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