Des anciens cadres dirigeants du géant américain de la malbouffe viennent d’être placés en garde à vue et entendus par le parquet anticorruption pour « blanchiment de fraude fiscale en bande organisée ». En cause ? Un montage financier avec le Luxembourg qui permettait à McDonald’s de ne pas déclarer de bénéfices en France, et ce malgré un succès qui ne faiblit pas dans l’Hexagone.
Quatre anciens cadre de McDonald’s France – dont un désormais directeur général pour la France de Burger King – sont interrogés depuis trois semaines par l’Office central de lutte contre la corruption et les infractions financières et fiscales. Un évènement qui constitue une première réelle avancée dans une affaire qui a commencé en 2013, lorsque la CGT est devenue le syndicat majoritaire au comité d’entreprise de McDonald’s Ouest parisien, qui regroupe 16 restaurant et emploie 900 salariés. Le syndicat avait alors demandé des hausses de salaires et une augmentation de l’intéressement aux bénéfices des salariés, mais la direction de l’entreprise – qui est l’une des cinq filiales françaises du géant américain des fast-food – leur avait répondu que c’était impossible, en raison des mauvais résultats de l’entreprise. Une réponse qui a étonné les employés, compte tenu du grand succès des restaurants au M jaune dans l’Hexagone. Un succès que les salariés peuvent constater au quotidien, et qui n’est pas qu’une impression : la multinationale américaine ouvre chaque année des dizaines de nouveaux restaurants en France.
la multinationale américaine ouvre chaque année des dizaines de nouveaux restaurants en France.
Où l’argent de McDo s’envole-t-il donc ? Le rapport « Unhappy Meal », résultat de mois d’études et d’expertises commandées par la CGT, donne la réponse : au Luxembourg. Une destination qui n’a rien de surprenant, mais le montage financier élaboré l’est un peu plus : il s’agit pour McDo de tirer bénéfice des « patent boxes » (« boîtes à brevets ») en créant une filiale dans un pays où les revenus liés à la propriété intellectuelle ne sont pas ou peu taxés, puis de faire facturer par cette filiale d’important montant aux franchises McDonald’s (des montants justifiés par l’utilisation de la marque, des logos, du nom des produits, de publicités et même des stratégies de management). Ainsi, le bénéfice des franchises (qui représentent 93% des restaurants McDonald’s) fond, ce qui fait par la même occasion fondre comme un Sundae au soleil l’imp ôt sur le sociétés payé par desdites filiales, et l’intéressement des salariés. On estime que 20 à 25 % du chiffre d’affaires des restaurants partait ainsi directement vers la filiale luxembourgeoise, qui aurait ainsi touché 1,2 milliard d’euros en 2014.
Le schéma fiscal du géant de la malbouffe passe désormais par Londres, mais l’optimisation continue : selon le JDD, « un compte bancaire de McDonald’s approvisionné de plusieurs dizaines de millions d’euros aurait été récemment bloqué ». La direction affirme quant à elle que McDonald’s « collabore avec les autorités judiciaires » et « déclare ses activités en France et paye tous les impôts dus conformément aux législations en vigueur ». Un léger mieux dont se félicite le secrétaire général de la CGT McDO Gilles Bombard, dont les propos ont été rapportés dans l’Humanité : « Depuis nos plaintes, McDo a ajusté ses pratiques en déclarant un léger bénéfice en France. Les salariés peuvent espérer une petite prime de participation. Mais le système des franchises est toujours contestable et au moins 20 % du chiffre d’affaires s’évapore toujours. » Une bonne raison pour le comité d’entreprise CGT et leur avocate, Eva Joly, de maintenir la plainte déposée contre McDonald’s Ouest parisien pour « blanchiment de fraude fiscale en bande organisée ». Il espèrent désormais un renvoi devant le tribunal correctionnel pour que les salariés puissent se porter partie civile.

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- Collectif (Auteur)