Sérénade de Trump à Langley

La CIA est un quartier général de l’État profond et du gouvernement fantôme. C’est le réseau criminel à la fois des Bush, des Clinton et de l’élite qui mène le monde. La CIA dispose d’un budget tiré d’une caisse noire et d’un pouvoir pratiquement illimités qui s’élèvent au‑dessus de la loi et du contrôle de la Maison‑Blanche.

Pourtant, on a vu Trump chercher à entrer dans les bonnes grâces de l’agence qui, sous les ordres de John Brennan (au nom d’Hillary Clinton et des Bush), avait déployé des efforts sans précédent pour chercher à le détruire.

Trump s’est surpassé par sa flagornerie mielleuse :

« Personne n’est aussi attaché à la communauté du renseignement et à la CIA que Donald Trump. Personne. Je suis complètement avec vous. Vous allez recevoir tellement de soutien, que vous allez me dire : ‘Mais c’est trop Monsieur le président!’ Nous allons faire des choses fantastiques. Nous n’avons pas utilisé les réelles capacités dont nous disposons. Nous avons été sous la contrainte. Nous devons nous débarrasser de Daesh. Le terrorisme islamiste radical doit être éradiqué de la surface de la Terre. C’est le mal. On n’a jamais rien vu d’aussi maléfique. Vous allez devoir faire un travail phénoménal, mais vous y mettrez fin. Ce groupe deviendra l’un des plus importants pour assurer notre sécurité, pour faire de nous des gagnants à nouveau, pour mettre fin à tous nos problèmes. Je suis avec vous à 1000 %! Je vous aime, je vous respecte et c’est vous qui allez mener la charge. »

Trump est-il naïf, mal informé ou en train de jouer à un jeu orwellien?

Combien parmi ceux qui ont écouté son discours, parmi ceux qu’il invite à « mener la charge » sont, en fait, les principaux acteurs derrière le terrorisme islamiste, rien de moins que les créateurs et les dirigeants de Daesh?

La CIA forme en fait ce « groupe de gens malades » responsables d’orchestrer le terrorisme international et d’innombrables atrocités. Comment Trump va‑t‑il s’y prendre pour amener la CIA à « éradiquer » le terrorisme islamiste, alors que cette institution qu’il « aime et respecte » continue de fomenter et de disséminer la crainte et le chaos?

Trump sait-il que la CIA, en plus d’être le chef de file mondial du terrorisme, est le ministère de la propagande des États‑Unis? Trump se rend‑il compte que la CIA contrôle les grands médias institutionnels qui l’attaquent sauvagement sans relâche, et que bon nombre des personnes à qui il fait de beaux discours sont les mêmes qui instrumentent la propagande vicieuse et les tentatives de coup d’État continuelles dirigées contre lui et sa présidence?

Le discours servile de Trump était-il un aveu de capitulation, que rien ne va changer à l’exception de la haute direction (en troquant Brennan pour Mike Pompeo), parce qu’il croit que rien ne doit changer?

Que voulait-il dire quand il a affirmé que la CIA était « sous la contrainte »? En quoi la CIA, qui est plus puissante et agressive aujourd’hui qu’elle ne l’a jamais été de son histoire peu reluisante, est‑elle « sous la contrainte »? L’ampleur du terrorisme, de la violence, de la criminalité et des conflits a atteint des proportions sans précédent, qui nous place à deux doigts de la Troisième Guerre mondiale. La CIA sera‑t‑elle donc autorisée, sous Pompeo et Trump, à s’engager encore plus activement dans des actes terroristes, des opérations sous fausse bannière, des déstabilisations de régime, des coups d’État, des assassinats, le trafic de stupéfiants, la fraude financière, la corruption, le contrôle des médias, la désinformation et la trahison à plus grande échelle sans être sous la contrainte »?

Trump est ouvertement en faveur des interrogatoires musclés et de la torture, ce qui signifie qu’il soutient les méthodes perfectionnées et utilisées par la CIA. Pour réduire la pression politique, Trump dit qu’il permettra au secrétaire à la Défense Mattis, qui est contre la torture, de le « bloquer », en l’autorisant à décider au cas par cas si la torture de prisonniers est indiquée. Est‑ce que l’enthousiasme sans réserve de Trump pour la torture est un exemple de ce qu’il entend par les capacités « sans contrainte » de la CIA et par les « choses fantastiques » qu’il voudrait que la CIA fasse?

Comme l’a écrit l’ancien membre de la CIA Victor Marchetti dans son exposé classique intitulé The CIA and the Cult of Intelligence (la CIA et le culte du renseignement), la CIA « ne fonctionne pas essentiellement comme un centre d’information et un créateur de renseignements nationaux pour le compte du gouvernement ». Sa mission fondamentale, « ce sont les opérations clandestines, en particulier les actions occultes, les interventions secrètes dans les affaires internes d’autres pays. Le directeur de la CIA n’était pas non plus une figure dominante, ou très intéressée, dans la direction et la gestion de la communauté du renseignement qu’il est censé diriger. Sa préoccupation majeure, à l’instar de la plupart de ses prédécesseurs et du directeur actuel de l’agence, c’était la surveillance des activités clandestines de la CIA ».

À cela s’ajoute la gestion des entreprises de la CIA solidement enracinées, dont les billions de dollars volés et blanchis placés dans des comptes bancaires secrets et des sociétés fictives, ainsi que la gestion d’un vaste réseau d’atouts politiques de la CIA partout à Washington et dans le monde des affaires. Que compte faire Trump, par exemple, au sujet de cette initiative d’envergure de la CIA qui demeure sous le contrôle du réseau Bush-Clinton et qui est farouchement opposée à Trump?

Bien qu’il y ait des agents et des employés de la CIA, y compris des gens d’expérience toujours en poste ou à la retraite, qui s’opposent aux opérations criminelles de l’agence, ce ne sont pas ces subalternes qui dictent la politique de la CIA depuis sa création. Ces « bons gars » forment une minorité. Les réformes qu’ils proposent et les alertes qu’ils lancent ne donnent pratiquement rien et sont contrecarrées avec une force inouïe.

Y a-t-il des indices qui laissent croire que Trump et Pompeo cherchent à réformer la CIA pour en faire une institution redevable à son propre gouvernement? Trump et Pompeo cherchent‑ils tout simplement à coopter d’une manière ou d’une autre cette structure au‑dessus des lois en conservant ses pires éléments pour parvenir à leurs propres fins (quelles qu’elles soient)?

La « guerre au terrorisme » de Trump : Une guerre contre soi-même?

Trump promet une guerre totale contre le terrorisme islamiste et Daesh.

Comment Trump peut-il mener une guerre totale contre le terrorisme islamiste lorsque l’agence dont il est « le plus fidèle partisan » et qu’il soutient « à 1 000 % » est responsable de la création du terrorisme islamiste et de son utilisation continuelle comme ressource du renseignement militaire anglo‑américain à des fins géopolitiques? Trump se rend‑il compte que la CIA finance et arme Daesh, le front Al‑Nosra et Al‑Qaïda?

La « guerre au terrorisme » de Trump : Va-t-il s’en prendre aux « ressources des services de renseignement » des USA?

Trump comprend-il que depuis des décennies, la CIA est responsable d’opérations terroristes sous fausse bannière, dont les attentats du 11 septembre 2001? (À ce sujet, Trump semble croire à une variation du discours officiel faisant consensus, qui accuse des terroristes islamistes, peut‑être aussi les Saoudiens, ainsi que George W. Bush pour ne pas avoir réussi à tuer Oussama ben Laden. Par conséquent, la CIA est irréprochable. Trump maintient cette opinion, malgré son expérience de première main qui contredit la version officielle.)

La « guerre totale contre le terrorisme » de Trump englobe-t-elle la guerre au vaste réseau de ressources de la CIA actuellement engagées dans des opérations de déstabilisation partout au Moyen‑Orient? Quel est exactement son plan à l’égard de l’Armée syrienne libre et du front Al‑Nosra, qui sont des groupes-paravents de la CIA?

Comment les réseaux existants peuvent-ils demeurer en place sans provoquer un désastre? Trump va‑t‑il pousser les forces armées des USA reconnues officiellement à combatte les mandataires de la CIA qui travaillaient sous les ordres de l’administration Obama?

Trump va-t-il stopper les opérations militaires et de renseignement en cours dans l’ensemble de la région? Comment va‑t‑il couper le financement des terroristes (qui provient notamment de Washington et de la CIA, de l’Arabie saoudite, du Qatar et d’Israël)? Qu’arrivera‑t‑il aux centaines de cellules de la CIA et à ses réseaux de renseignement étranger qui la soutiennent?

Bien des gens comparent les objectifs anti-establishment affichés par Trump à l’erreur fatale de John F. Kennedy d’avoir voulu en finir avec l’État profond et la CIA. Plus précisément, si Trump ose démanteler la CIA et la politique étrangère impérialiste en place depuis la fin de la Guerre froide, il se placera dans la même position précaire que JFK au moment de l’invasion de la baie des Cochons à Cuba. JFK a payé de sa vie pour avoir ruiné les plans de la CIA. Imaginez les répercussions pour Trump s’il met fin à la conquête du Moyen‑Orient et de l’Asie centrale.

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