Les GAFA élevés au rang de puissance diplomatique ou la tyrannie des géants du Web

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Le Danemark va établir un ambassadeur auprès des GAFA. Pour Marc Rameaux, en leur accordant la reconnaissance due à un État, Copenhague leur donne la possibilité d’agir en toute impunité car « la valise diplomatique dépasse les meilleurs algorithmes de cryptage ».

L’annonce peut paraître exotique et relever du coup de communication : le Danemark s’apprête à nommer un ambassadeur auprès des GAFA, les titans du domaine numérique, en considérant ceux-ci au même rang qu’une nation constituée.

Le titre d’ « ambassadeur » ne revêt pas le caractère symbolique employé dans les cercles digitaux : l’idée émane d’Anders Samuelsen, ministre des Affaires étrangères du Danemark, relayée par le fort sérieux quotidien danois Politiken et en France par Les Échos. Il ne s’agit donc pas de la version imagée que l’on rencontre fréquemment dans le commerce digital, mais de la nomination d’un véritable diplomate ayant rang d’ambassadeur.

Ainsi les GAFA commencent à être reconnues non comme seules entités économiques, mais comme puissances politiques, au même titre que le pouvoir exécutif d’une nation. Comme le souligne Vincent Giret, ce type d’information est l’exemple même du « signal faible », ces événements qui passent inaperçus mais sont annonciateurs de bouleversements majeurs.

Financièrement, il fut déjà remarqué que le chiffre d’affaires cumulé des GAFA atteignait le PIB d’un État moyen. Toute l’ironie est que cette observation faite dès 2014 avait précisément pris comme point de comparaison… le Danemark ! Le même calcul effectué sur les capitalisations boursières excède quant à lui largement le PIB du pays nordique, sans parler des réserves financières des géants du numérique, généralement mises à l’abri dans des paradis fiscaux, leur permettant de racheter toute start-up prometteuse et d’étouffer toute velléité de concurrence dans l’œuf.

L’élévation au statut d’une nation selon Anders Samuelsen est donc établie sur le seul critère de la puissance financière, non sur celui d’une histoire politique, d’une constitution ou d’un projet de la res publica.

Le danger d’une telle situation n’échappe à personne, renvoyant à toutes les formes possibles du conflit d’intérêts. Trois exemples illustrent les redoutables dérives auxquelles cette collusion peut donner lieu :

Le projet de numérisation frénétique de tout document par Google sous le nom de Google Books, entamé dès 2004 et encore vivace, montrait comment une société privée pouvait s’emparer du fonds culturel le plus ancien de n’importe quel pays du monde, y compris le nôtre. Ce n’est qu’au prix des batailles juridiques et économiques les plus rudes que les enluminures des monastères français archivées à la BNF ne tombèrent pas entre les mains du géant de Mountain View dans leur version numérique.

Les premières conditions que voulait imposer Google dans sa boulimie de numérisation étaient celles auxquelles un Gérard Collomb céda pour la bibliothèque municipale de Lyon, la deuxième de France : pour les ouvrages libres de droits, incluant donc des manuscrits anciens, Google prenait à sa charge la numérisation, en échange d’une exclusivité sur la version digitale pendant 25 ans ! Une forme à peine masquée de dumping sur les fonds culturels de notre histoire.

Pour des ouvrages tombant sous le droit d’auteur, le projet Google Books aligna les procès, y compris auprès de l’Author’s Guild américaine. Ils piétinèrent allègrement toute forme de propriété intellectuelle, arguant par exemple lors de leur procédure juridique contre les éditions du Seuil, que si la maison d’édition française détenait les droits des œuvres en édition papier, elle n’avait nullement prouvé que c’était le cas pour leur version numérique. Ceci sous le prétexte que la numérisation avait eu lieu sur le territoire américain et ne relevait donc plus du droit français. Difficile de faire mieux en matière de mauvaise foi… mondialiste en matière de commercialisation, protectionniste pour l’abus de position dominante.

Jusqu’où de telles pratiques seraient-elles montées si la firme avait disposé, en sus de sa considérable force de frappe financière, des leviers diplomatiques, légaux et relationnels d’un État ? En cas de litige, devra-t-on craindre d’agir de peur de provoquer un incident diplomatique avec une version 2.0 de la nation ? Les pratiques des GAFA ne relèveraient plus du droit commercial mais du Quai d’Orsay, avec son lot d’atermoiements, de compromis douteux, de manœuvres échappant à tout contrôle démocratique. Les GAFA pourraient aller jusqu’à invoquer un principe de souveraineté, modelant et remodelant le droit selon leur intérêt du moment.

Le second effet de levier dévastateur d’une reconnaissance diplomatique des GAFA proviendrait de leurs fameuses réserves financières, cet appoint de cash immédiatement disponible leur permettant d’absorber et digérer toute start-up prometteuse qui pourrait un jour leur faire de l’ombre.

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